La disparition de Helena – Chapitre 6

Chapitre 6 – Retour à la case départ

 

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    A 10h30 pétantes, la réunion commence. Après les formalités d’usage, Helena en vient à expliquer les raisons de sa demande. Elle leur annonce qu’elle est enceinte et que suite à plusieurs tests médicaux, il lui est recommandé de ralentir son rythme de travail. C’est à cet effet qu’elle souhaite changer son contrat de travail à temps plein en un contrat à temps partiel, juste pour le reste de sa grossesse. A la fin de son congé maternité, elle aimerait néanmoins réintégrer son poste actuel à plein temps. En entendant la nouvelle, Pascale est ravie pour Helena, elle-même n’a jamais eu la chance d’avoir des enfants. Mais à son avis, elle devrait totalement arrêter de travailler ; il est certes glorifiant pour une femme d’avoir une carrière mais ce n’est pas le rôle d’une mère. Une mère doit être à la maison pour s’occuper de son enfant et du foyer pendant que son homme subvient aux besoins du foyer. Et puis si elle n’est pas tout le temps à la maison après la naissance de son enfant, son compagnon sera plus tenté de prendre son congé paternité pour la remplacer auprès du bébé. Compagnon qui est dans l’entreprise, ce qui lui ferait perdre de son efficacité, déjà qu’il va falloir essuyer la future perte de performance d’Helena… Parce que, sans compter sa demande de temps partiel, si elle revient après son congé maternité, ce ne sera quand même pas comme maintenant où elle peut faire des heures supplémentaires et n’a que ses missions à penser… Après il y aura les congés pour bébé malade, les départ plus tôt pour récupérer le petit à l’école, etc etc. Pascale n’approuve pas vraiment le projet d’Helena d’être mère et de continuer à travailler. Ophélie elle, est surprise. Elle ne connait pas vraiment Helena mais elle imagine sa situation : une jeune femme, tout juste arrivée dans le milieu professionnel et qui tombe enceinte. Elle se doute que la situation d’Helena doit être dure et elle éprouve de la compassion envers elle. Mais malgré ces bons sentiments, jamais Ophélie ne s’hasarderait à lui exprimer oralement son soutien : elle ne connait pas assez la situation sociale d’Helena dans l’entreprise pour risquer de s’attirer des ennuis. Et puis Helena a le soutien de son compagnon, un autre employé de l’entreprise ce qu’on dit. C’est bien pour eux : la politique d’Automob’Act est de soutenir les jeunes pères. Son compagnon pourra donc profiter des 3 jours de congé de naissance puis des 11 jours de congé paternité.

    A la fin de la réunion, les trois femmes se séparent et Helena espère que la décision finale sera prise rapidement et le plus en sa faveur possible. En retournant à son bureau, elle constate que 2 nouveaux dossiers y ont été déposés. Elle ne s’est pas encore attelée aux premiers car elle n’a pas terminé ses rapports mais elle compte pouvoir s’y mettre dès l’après-midi. Et en effet, quand arrive la pause déjeuner, Helena a fini ses rapports. Elle se dirige vers l’accueil pour proposer à Justine de manger avec elle et elle ne peut s’empêcher de remarquer les regards que les gens lui portent sur son passage. En arrivant dans le hall d’entrée, plusieurs petits groupes d’employés s’arrêtent de parler pour mieux la dévisager. Un malaise montant envahi Helena qui baisse la tête et fonce droit sur son amie. En entendant les bavardages s’interrompre, Justine lève brièvement les yeux et c’est là qu’elle voit Helena se précipiter vers elle. Elle enregistre et ferme aussitôt ses fenêtres de travail puis se lève en prévenant ses collègues qu’elle prend sa pause déjeuner. Elle rejoint Helena de l’autre côté du comptoir et attrapant son bras, l’entraine à l’extérieur du bâtiment. Pendant qu’elles mangent, Helena lui parle des comportements étranges dont elle a été témoins. Justine sait déjà tout ça. Toute la matinée, elle a vu les gens commérer en toute indiscrétion dans le hall d’accueil. « Finalement c’était pas les fêtes… » « Je t’avais bien dit qu’elle avait pris des seins ! » « Je me disais bien que je la trouvais plus négligée » … sans compter les personnes sans gêne qui, connaissant ses liens proches avec l’intéressée, étaient directement venus la voir pour qu’elle leur en apprenne plus ! Bien entendu, Justine les avait élégamment envoyés promener. Aussi, sans lui exposer les détails des moqueries et des racontars, Justine explique à Helena l’incident du vendredi matin. A présent, une bonne partie des employés doivent être au courant de sa grossesse, grâce à la propagande de Brian… Helena tombe des nues. Elle n’avait pas l’intention d’avertir toute l’entreprise de cette nouvelle. Choquée, Helena a du mal à entendre la voix de Justine qui lui assure qu’elle la soutient et lui demande ce qu’elle peut faire pour l’aider… Helena pense à ses craintes qui se réalisent : maintenant elle est exposée aux jugements de tous ses collègues ! Que vont-ils penser ? Que vont-ils dire et surtout que vont-ils ne pas dire… Et Marc ! Lui qui voulait être discret… Que vont-ils penser de lui ? Et lui… que va-t-il penser d’Helena… Ce n’est pas vraiment sa faute mais si elle n’avait pas craqué devant Frédéric, Henry ne serait peut-être pas arrêté et il n’aurait pas entendu la nouvelle et il n’aurait pas demander à Justine et Brian n’aurait pas entendu ! Si seulement elle avait été plus forte… si seulement elle était plus forte ! Helena se perd dans un tourbillon de pensées. Justine doit lui secouer légèrement l’épaule pour qu’elle reprenne pied dans la réalité. « Oui, ça va, ne t’inquiète pas… J’ai juste été surprise ». Les propos d’Helena ne rassurent pas vraiment Justine qui voit son amie triturer nerveusement le coin de sa veste, les yeux apeurés.

    En rentrant de la pause déjeuner, Helena ne croise le regard de personne. Elle entend les conversations se suspendre sur son passage et décide de fermer son esprit pour ne plus s’en rendre compte. Helena s’installe à son bureau et commence à s’occuper du premier dossier. Celui-ci traitant d’un cas très simple et demandant majoritairement de compléter des formalités théoriques, Helena s’en occupe machinalement. Son corps et son cerveau effectuent un travail mécanique mais sa concentration est ailleurs. Elle le termine rapidement en environ deux heures et demi. En ouvrant le deuxième dossier, elle constate qu’il est à peu près similaire au premier. Sur sa lancée Helena le finit en deux heures. Vers 17h30, elle ouvre le troisième dossier et découvre qu’il s’agit encore du même type. Surprise et un peu décontenancée, Helena parcours la pile des cas qu’elle doit traiter et constate qu’ils suivent tous le même modèle : peu de réflexions et beaucoup de procédures. Le type de documents qui lui étaient confiés lorsqu’elle était stagiaire dans l’entreprise presque 3 ans auparavant. Helena décide d’aller voir Frédéric. Elle imprime ses rapports du matin et les 2 dossiers qu’elle vient de traiter et se rend dans le bureau de son supérieur. La porte est ouverte et Helena toque légèrement avant d’entrer. Frédéric est concentré derrière son écran d’ordinateur. Elle dépose les documents sur son bureau et Frédéric marmonne de vagues remerciements. Helena hésite devant son indisponibilité manifeste. Elle renonce finalement, retourne à son bureau et ne le quitte pas avant d’avoir fini le troisième dossier. Elle finit par rentrer chez elle à 19h45, fatiguée de sa longue journée et appréhendant le lendemain.

    Mardi 25 février, Helena regarde Marc quitter leur lit après l’avoir embrassée. Elle n’a pas eu le courage de lui dire hier que toute l’entreprise est au courant qu’ils attendent un enfant. Et Marc ne semble pas avoir vécu de différence au travail donc pourquoi le stresser… D’autant qu’il faudrait lui expliquer l’altercation qu’elle a eu avec Frédéric le vendredi précédent… Helena ne veut pas lui montrer à quel point elle a été faible face à l’intrusion totalement informelle de Frédéric dans leur vie privée, elle ne veut pas qu’il la méprise… Elle s’en veut, elle sait qu’elle doit lui dire mais alors qu’elle ouvre la bouche pour l’interpeller, les mots restent bloqués dans sa gorge. Elle lui dira ce soir… En arrivant au travail, comme la veille, elle baisse les yeux et se rend directement à son bureau où se trouvent trois nouveaux dossiers. Helena n’a besoin que d’un coup d’œil pour se rendre compte qu’il s’agit encore du même genre de dossier. Elle dépose ses affaires et se rend dans le bureau de Frédéric. Après s’être fait invitée à entrer et l’avoir salué, Helena demande à Frédéric pourquoi il lui a donné une pile de dossiers de niveau stagiaire. Son supérieur lui lance un regard puis lui explique distraitement que ce sont des dossiers urgents et qu’elle ferait mieux d’y retourner au plus vite. Helena n’est pas vraiment convaincue par ses explications mais elle choisit quand même de se retirer et d’obéir à Frédéric. En retournant à son bureau, elle croise Brian. Il est accoudé à la machine à café et parle avec deux compagnons. Helena en reconnait un pour être un proche collègue de Marc. « Elle a pris au moins un bonnet ! Qu’est-ce que ça va être dans quelques mois haha ! J’ai hâte les gars ! ». Sans le saluer, Helena passe son chemin et ce n’est que lorsqu’elle entend un sifflement provocant que les mots de Brian prennent leur sens et qu’elle comprend qu’ils parlaient d’elle. Elle accélère d’un coup et sens les larmes lui monter aux yeux. Au lieu de se rendre à son bureau, Helena se presse vers sa voiture. A peine referme t’elle la portière derrière elle qu’elle fond en larme. Serait-elle en train de faire une Patrick, quoi que cela puisse dire ? C’est très dur pour elle et plusieurs minutes passent avant qu’elle ne pense aux conséquences de sa crise. Il faut qu’elle sorte de la voiture, et qu’elle retourne dans l’entreprise la tête haute. Elle ne peut pas se permettre d’alimenter plus encore les commérages. Elle respire un grand coup, sèche ses joues et sort de la voiture. Elle baisse les yeux et fait tomber ses cheveux autour de son visage pour mieux le dissimiler. Et pour ses yeux rouges, elle répondra à qui veut l’entendre qu’elle a eu un problème avec ses lentilles de contact. A peine est-elle arrivée jusqu’à son bureau que déjà les murmures reprennent autour d’elle. « Elle a les yeux rouges… », « Qu’est ce qui s’est passé », « C’est surement les hormones ! », « J’ai entendu… », « … Brian l’a vu … ». Helena lève la tête d’un coup et tempête « J’ai eu un problème avec mes lentilles d’accord ! ». Pris en flagrant délit, ses collègues se dispersent en continuant de murmurer. « Pas la peine d’être si désagréable ! – Laisse, c’est les hormones j’te dis ». Helena se tourne vers son ordinateur, honteuse d’avoir explosé comme ça, surtout que sa réaction n’est que friandise pour ces gens. Fermant les yeux, elle se promet de ne plus jamais réagir quitte à… Non, il ne juste plus qu’elle réagisse, point. Helena se coupe de la pièce et des gens qui l’entourent. Son esprit est vide, sa vision est trouble. Elle prend le dossier en haut de la pile et se remet au travail.

    La journée se déroule très lentement et Helena ne s’arrête pas une seconde pour prendre une pause. Elle ne veut pas se lever de son bureau et affronter le regard des autres, elle ne veut pas les voir, elle ne veut pas qu’ils la voient. Le temps passe et elle continue de remplir ses dossiers insignifiants. A 18h, son ventre gargouille mais elle ne s’en rend pas compte, son corps est très faible mais elle ne s’en rend pas compte. Elle n’a pas pris de pause déjeuner, de même qu’elle n’a pas vu les aiguilles tourner dans le cadrant de sa montre. C’est le petit son aigu d’une notification prioritaire qui la sort de sa torpeur robotique. Elle cesse de taper frénétiquement sur les touches de son clavier lorsqu’elle lit l’objet du mail qu’elle vient de recevoir : « Précisions rapport du dossier B-3033 ». Il s’agit du dossier sur lequel elle travaillait jusqu’à la semaine dernière. Le gros dossier pour lequel elle a travaillé tant d’heures supplémentaires, passé tant de coup de téléphone et envoyé tant d’emails. Son collègue, Michel Rermet, lui envoyait un mail pour lui demander des précisions sur son dossier à elle ! Son projet, son bébé ! Helena ne comprend pas. Si elle ne travaille plus dessus actuellement, c’est parce que Frédéric lui a demandé de s’occuper prioritairement d’une pile de petits dossiers ridicule ! Il n’y a pas de raisons pour que Michel lui envoie un mail demandant des précisions ! D’abord il ne connait rien à ce dossier ! … Mais dans quel but Frédéric lui a-t-il demandé de faire des rapports sur ses projets en cours ? Helena veut en avoir le cœur net et décide de retourner le voir. En arrivant dans son bureau, elle le confronte au mail qu’elle vient de recevoir. Elle voit l’hésitation sur le visage de Frédéric puis il se tourne vers elle et avec une expression teintée de condescendance il lui avoue qu’il a appris de la réunion qu’elle demandait un temps partiel sur avis médical. Il a donc pris la décision de lui donner des petits dossiers très satisfaisants à faire puisqu’ils sont assez simples. « Ce qui est bien c’est que tu peux te détendre en les faisant, ça va te faire du bien ! ». Alors qu’Helena est sur le point de protester, il rajoute qu’avec sa demande de temps partiel, il fallait de toutes façons que quelqu’un prenne la relève sur ses dossiers ! Ce sont des dossiers à temps complet ; et oui, si elle n’est pas capable de les faire, il faut bien que quelqu’un s’en charge à sa place, parce qu’ils restent très importants pour le développement de l’entreprise. Comme si Helena ne le savait pas… Bien sûr qu’elle le sait, c’est une des raisons pour lesquelles elle a mis son cœur et sa santé dedans ! Ravalant son amertume, elle remercie Frédéric de ces précisions et quitte sur bureau alors qu’il déclare « C’est pour toi que je fais ça ». C’est pour elle qu’il ça… c’est pour elle qu’il fait quoi ? Qu’il la met au placard ? Qu’il lui retire ce qui compte pour elle ? Qu’il lui retire des responsabilités pour la relayer au rang de stagiaire à nouveau ? Alors que SI, elle est capable ! Helena fulmine. Son cerveau se repasse sa conversation avec Frédéric. Ne lui a-t-il pas dit qu’il avait pris sa décision après avoir lu le rapport de la réunion ? Mais pourtant il lui a demandé de faire ses rapports et de remplir ces dossiers minables dès son arrivée la veille, avant même que la réunion n’ait eu lieu ! Il avait donc dès le départ l’intention de la mettre au placard… Frédéric, son tuteur, son supérieur, même lui ne la soutient plus… La demande de temps partiel est déjà une horrible concession pour Helena, qui souhaite à tout prix rester impliquée dans l’entreprise ! Mais là, on lui retire ce pourquoi elle s’est impliquée, on l’isole… La décision de Frédéric est un cadeau empoisonné. Helena prend ses affaires et part de l’entreprise.

    Pour une fois, c’est Marc qui rentre le dernier du travail. Il lui en fait la remarque et Helena ne répond rien. Visiblement, il n’a toujours pas remarqué qu’elle était la cible de tous les commérages et que toute l’entreprise était au courant de sa grossesse. Helena décide de ne pas lui dire. Après tout, s’il n’a pas remarqué, c’est qu’il ne s’y intéresse pas vraiment. Elle se sent plus seule que jamais. Marc prépare un nouveau déplacement qui aura bientôt lieu : il part dans la matinée du vendredi (le 28 février) et revient dans la journée du dimanche 1er mars. Ce départ rend Helena nerveuse qui ne sait toujours pas où en est Marc dans sa demande de réduction de déplacements. Le fait d’y penser la pousse à poser de nouveau la question à son compagnon. Absorbé dans ses pensées, ce-dernier lui présente ses excuses, expliquant qu’il a tant de choses à s’occuper qu’il a oublié, qu’il va demander bientôt, qu’elle ne doit pas s’inquiéter. Helena se laisse aller dans ses bras, bien loin d’être rassurée.

 

Auteure ou autrice (va falloir choisir un jour) : Lorysse Marchal

Le chapitre 7 la semaine prochaine !

La disparition de Helena – Chapitre 5

Chapitre 5 – Indiscrétions

 

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    Le lendemain matin, Helena se rend au travail un peu stressée mais sereine d’avoir trouvé des solutions. En arrivant à son bureau, elle respire un grand coup puis s’attelle à rédiger son mail. Elle exprime sa requête de changer de contrat pour passer à un temps partiel sans en expliquer les raisons et demande en vue de cela, une réunion. En effet, elle préfère annoncer sa grossesse en face-à-face. En partie car elle redoute les réactions de ses supérieurs et aussi parce qu’elle aimerait demander ce temps partiel uniquement le temps de sa grossesse avant de partir en congé maternité. Elle souhaite vraiment pouvoir réintégrer son poste actuel à la fin de cette série de complications. Après avoir passé plusieurs dizaines de minutes à lire et à relire, à formuler et à reformuler son mail, Helena finit par l’envoyer. Elle l’adresse à Marthe Villard, la directrice des Ressources Humaines et met en copie Sergeï Miklov, le directeur des et Frédéric Louchalle. Une fois le mail envoyé, Helena ne se détend pas pour autant. Une angoisse monte en elle. Et si elle n’avait pas pris la bonne décision, et si elle n’avait pas utilisé les bons mots ? Elle décide de noyer ses réflexions dans le travail et passe la matinée très concentrée sur ses missions. Vers 13h, elle se résout à prendre une pause déjeuné sur le pouce puis retourne à son bureau à 13h20 où elle trouve une note à l’écriture bâclée. Frédéric lui demande de se rendre dans la salle de réunion pour y rejoindre l’équipe. Interloquée, Helena se presse vers la petite salle de l’unité. Elle ouvre la porte discrètement et pénètre la pièce, où elle s’assoit sur la première chaise libre. Les six membres du département Recherches ainsi que plusieurs employés venant d’autres départements sont déjà installés. Au moment où Helena arrive, Sergeï Miklov finit de remercier la petite assemblée d’être venue malgré une convocation de dernière minute. Il introduit ensuite Frédéric qui le salut avant d’entamer son discours. « Bonjour à tous, Sergeï a déjà couvert les remerciements donc je vais aller à l’essentiel. On est dans une période d’expansion, c’est pas le moment de vous relâcher les gars ! On a plein de travail et vous êtes payés pour le faire. Vous avez fait du bon boulot jusque-là, alors continuez ! Prendre des vacances, des congés… C’est vraiment pas le bon moment ! ». Les yeux de Frédéric ont beau couvrir toutes les personnes présentes, Helena sent qu’ils s’attardent sur elle. Elle détourne les siens, gênée et son regard glisse vers Sergeï qui la fixe intensément. Helena sent son souffle se saccader et un sentiment d’oppression monte en elle. Frédéric continue son discours. Il mentionne le travail accompli et les objectifs à atteindre. Finalement, après 10 minutes de présentation, Frédéric conclut par « C’est pas le moment de se relâcher ». Helena le regarde droit dans les yeux lorsque qu’il appuie cette dernière phrase en la fixant d’un regard brûlant. Elle se sent particulièrement visée. Elle a l’impression que cette réunion a été préparée et exécutée expressément pour elle. C’est comme s’il s’agissait d’une réponse directe à son mail du matin. Honteuse, le rouge aux joues, elle baisse les yeux en se joignant aux brefs applaudissements de l’assistance. Alors que la petite foule se disperse, Helena voit Frédéric et Sergeï s’entretenir en glissant des regards vers elle. Elle se lève et part vite se réfugier derrière son bureau.

    Helena ne décroche plus les yeux de son ordinateur du reste de la journée. Elle reçoit, vers 17h un mail de Pascale Prot, lui annonçant qu’elle-même et Ophélie Dujardin, une employée du service recrutement, ont été chargée de sa demande de changement de contrat. Elle lui propose ainsi une réunion dès le prochain lundi, le 24 février, à 10h30. Surprise de la rapidité de réponse, Helena s’empresse d’adresser son accord, une appréhension grandissante en son sein. Elle se replonge ensuite dans son travail, si bien qu’à 20h, lorsqu’elle entend la voix de Frédéric l’interpeller juste derrière elle, elle sursaute. Elle remarque alors qu’il n’y a plus personne dans l’open-space et qu’une fois encore, la salle s’est vidée dans qu’elle ne s’en rende compte. Elle se retourne et en voyant le visage fermé de Frédéric, ses joues se colorent de nouveau. Elle ne lui a jamais vu ce visage grave… Elle l’a déjà vu afficher un visage concentré, pour d’importants enjeux au travail, mais fermé, c’est la première fois. Elle a déçu Frédéric… lui qui comptait sur elle, qui l’a soutenu, qui était là, qui… « Je voudrais te parler. » Frédéric interrompt le flot de ses pensées. Helena, prise de court, répond en bégayant légèrement « Euh… Ou… oui, oui bien sûr ! ». Et elle s’empresse de faire de l’ordre sur son bureau en lui indiquant la chaise face à elle. Frédéric s’assied et entre directement dans le vif du sujet : « Pourquoi tu demandes un travail à temps partiel Helena ? » et sans lui laisser le temps de répondre, il perd sa maîtrise « Franchement ! Je comprends pas ! Pourquoi maintenant ? Tu te débrouilles bien, tu es une très bonne recrue, tu fais du bon travail… Qu’est-ce c’est ? tu essaies de trouver un job chez la concu ? T’es pas bien ici ? … Je comprends pas, explique moi ! ». La tête baissée, une boule dans la gorge, Helena répond d’une voix étouffée : « Je… je… je suis enceinte. » Un long silence suit cette révélation et Helena finit par relever la tête pour voir l’expression de Frédéric. Il s’est affaissé sur le dossier de sa chaise et regarde dans le vide quelque part derrière elle, en frottant son début de barbe. Helena l’interpelle, d’une petite voix, puis plus fort, n’obtenant pas de réaction à la première tentative. Frédéric sort de ses pensées et regarde Helena. Puis il se penche vers elle en s’animant soudain. « Mais euh, ça fait longtemps ? Ah bah je comprends pourquoi tu étais fatiguée ! Tu peux avorter ? C’est encore possible, non ? » « J’en suis à 14 semaines… » « et le délai, c’est quoi déjà … 20 semaines c’est ça ?! Bah voilà ! Non mais fait pas ça, t’auras plein de temps pour en faire, des gosses… Ça va te freiner ! Fait pas à ça Helena… tu es si prometteuse… ». Helena est au bord des larmes et répond avec difficulté « Le délai est de 12 semaines, et non je ne vais pas avorter, et oui je sais que ça va freiner ma carrière, mais j’y peux rien ! Maintenant j’aimerais vraiment finir ce dossier si tu veux bien… » Et elle se détourne pour faire face à son ordinateur et reprendre son travail. Les larmes roulent sur ses joues. Elle entend la chaise de Frédéric racler le sol alors qu’il se lève puis ses murmures quand il s’éloigne : « Quelle bêtise… si prometteuse… ». Helena se retrouve seule dans l’open-space assombri par la nuit qui était tombée au dehors. Elle pleure et alors qu’elle sent la crise de panique arriver, elle entend Henry Commure l’appeler. Le vigile maladroit la regarde, depuis l’ouverture de la porte. « Bah… ça va pas miss ? ». Helena se reprend et lui répond entre deux respirations saccadées qu’elle a connu des jours meilleurs. « … Je vois bien, mais vous faites pas tant de soucis, ça va passer. Ya des jours comme ça… Enfin, faut pas nous faire une Patrick hein ! » Et sur ces mots, Henry met la main devant sa bouche en agrandissant les yeux : « J’aurais pas dû dire ça ». Confuse, Helena demande « Dire quoi ? Qu’est ce c’est une Patrick ? » et le vigil, embarrassé lui répond « Non non mais… c’est rien… C’est une vieille expression dans l’entreprise, c’est un ancien employé d’ici qui… Non, non mais oubliez… Aller, restez pas là, vous devriez rentrer chez vous maintenant… ». Helena est fatiguée et complètement chamboulée. Elle acquiesce et rassemble ses affaires. Après avoir éteint l’ordinateur, elle salue Henry Commure et quitte l’open-space. Henry reste là. Helena ne sait pas qu’il a assisté à toute la scène entre Frédéric et elle.

    En arrivant à son poste à 9h, le vendredi 21 février, Justine voit Henry en train de chercher quelque chose dans les tiroirs du comptoir de l’accueil. « Bonjour Henry, lance-t’elle d’une voix chantante, vous cherchez quelque chose ? Je peux vous aider ? ». Henry lui répond qu’effectivement, il avait utilisé un post-it pour noter sa liste de courses trois au jours auparavant et que tête en l’air comme il était, il l’avait oublié sur le comptoir et depuis, pas moyen de remettre la main dessus ! Justine rigole et dit à Henry qu’elle se souvient avoir vu le post-it mais qu’il a fini à la corbeille entre temps. Henry soupire puis il s’excuse auprès de Justine d’avoir inspecté les tiroirs. Alors qu’il est sur le départ, Henry s’attarde devant le comptoir. Justine, voyant son hésitation, lui demande s’il y a autre chose qu’elle peut faire pour lui et Henry réfléchit encore plusieurs secondes avant de répondre « Euh… A propos d’Helena… Elle tient le coup ? Je veux dire, la grossesse tout ça… » « Grossesse ?! Quelle grossesse ?! Attendez quoi ?! Genre la miss Helena est enceinte ?! Eh bah dis donc… ça c’est une nouvelle ! C’est Philipe qui va être surpris ! ». L’intervention de Brian stoppe nette la conversation d’Henry et de Justine. Le temps que Justine ouvre la bouche pour demander à Brian de ne pas répandre la nouvelle, il est déjà parti, tout guilleret. De toute façon, cela n’aurait pu qu’être pire si elle lui avait demandé de se taire. Justine gratifie Henry d’un regard sombre. Sans faire attention, il a parlé trop fort et à cause de cela, toute l’entreprise va être au courant dans l’après -midi. Contrariée Justine lui lance « Bravo ! Maintenant il va aller claironner ça partout… Vous n’êtes même pas censé être au courant et vous criez déjà la nouvelle à tue-tête ! » et en voyant le visage affligé d’Henry, elle se radoucit « Non… excusez-moi, ce n’est pas à vous que j’en veux… Même si vous auriez quand même pu parler moins fort ! C’est à lui, cette espèce d’énergumène de Brian… Allez, ne vous flagellez pas trop, ça se serait bientôt su dans tous les cas… ». Henry acquiesce et s’éloigne en culpabilisant. Justine secoue la tête, respire un grand coup et commence à organiser son bureau pour la journée.

    Helena arrive au travail quelques minutes après l’incident mais ne croise ni Justine, ni Henry. Elle se dirige naturellement vers son bureau et s’assied en se préparant mentalement pour sa réunion de lundi à venir. Elle a annoncé la nouvelle à Marc la veille mais il n’a pas réagi comme Helena l’espérait… Par ailleurs, il ne lui a répondu que très vaguement lorsqu’elle lui a demandé où il en était dans ses démarches pour avoir moins de déplacements… La matinée se passe sans accros, même si Helena sent des regards insistants de la part des personnes présentes dans l’open-space. Frédéric vient la voir juste avant midi et s’excuse de s’être emporté la vieille, il a juste été pris de court et c’est tellement dommage… Ca le touche beaucoup et il espère qu’Helena le comprend. Finalement, il lui dit qu’il ne pourra pas être là à la réunion de lundi et il lui propose de prendre l’après-midi pour un week-end anticipé. Helena est très surprise de ce revirement et ne sait pas trop si elle devrait accepter. Elle finit par décider de suivre son conseil et rentre après avoir mis ses affaires en ordre.

    Le week-end passe et quand vient lundi Helena est toute stressée. Elle a les mains moites et le cerveau en effervescence ; d’autant que Frédéric lui a confié de nouvelles missions spéciales. En effet, en arrivant à son bureau, elle a trouvé une petite pile de dossiers, accompagnés d’une note. Dans cette-dernière, Frédéric demande à Helena de rédiger de brefs rapports sur toutes ses missions en court, de les imprimer en versions papier et de les laisser sur son bureau. Puis une fois cette tâche effectuée, elle devra s’occuper en priorité des nouveaux dossiers qu’il lui a amenés avant de reprendre ses missions. Helena s’attelle donc à la rédaction de ces rapports sans très bien comprendre pourquoi, mais son esprit est trop obnubilé par le reste pour prendre le temps de chercher des explications. Toutes les 2 minutes, Helena regarde l’heure dans le petit cadrant en bas à droit de l’écran de son ordinateur. Quand arrive finalement 10h15, Helena finit sa phrase, enregistre don dossier et éteint son ordinateur. Elle respire un grand coup, passe par les toilettes pour se rafraichir le visage et se dirige vers la salle de l’entreprise choisie pour la réunion. Elle sait qu’elle doit rencontrer Pascale Prot et Ophélie Dujardin. Si Helena connait clairement la première, en ce qui concerne Ophélie, elle n’est pas très sûre de qui il s’agit. Lorsqu’elle entre dans la salle 5 minutes en avances, Helena constate que Pascale et Ophélie sont déjà arrivées et sont en train de s’installer. En voyant son visage, elle remet tout de suite Ophélie. Il s’agit d’une jeune femme un peu réservée, souple et tolérante. La plupart du temps dans l’ombre de Pascale, Ophélie a souvent un rôle de médiatrice ; elle sait que Pascale peut sembler dure, un peu manipulatrice et qu’elle a ses idées bien ancrées mais ce n’est pas une mauvaise personne… Elle voudrait que les autres le voit aussi et c’est pour cela qu’Ophélie s’applique à tempérer sa collègue. Si elle récupère de temps à autre des post-it signature de Pascale et qu’elle s’excuse parfois après le passage de sa collègue, Ophélie reste effacée et humble en sa présence. Par exemple, elle n’ira jamais confier à Pascale ses quelques idées et remarques que l’on pourrait prendre pour progressistes ou féministes. Elle ne souhaite surtout pas créer de problèmes et veut garder une bonne entente avec sa collègue. Helena et elle n’ont pas de liens : quelques bonjours autour de la machine à café et voilà. Ce matin-là en revanche, c’est un bonjour accompagné d’une poignée de main qui est de mise. Helena salue donc ses deux collègues puis s’installe à son tour.

 

Auteure ou autrice (va falloir choisir un jour) : Lorysse Marchal

Le chapitre 6 la semaine prochaine !

La disparition de Helena – Chapitre 4

Chapitre 4 – Compromis

 

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    Le lendemain, Helena n’est pas prête à se confronter à Marc, elle part donc chez son amie Justine pour parler et se distraire. Elle lui raconte qu’elle est allée chez le médecin deux jours auparavant et qu’il lui a confirmé une certaine fatigue tout en lui recommandant plusieurs tests dont elle n’a pas encore les résultats. Elle lui parle aussi de sa soirée ratée avec Marc mais elle ne mentionne pas les incidents au travail. Helena est lasse d’en parler, et puis à ce stade, parler ne sert plus à rien. Partager avec Justine les commentaires à peine cachés de certains de ses collègues, à propos de sa prise de poids, de son déclin d’attirance, de sa mine sombre… n’est pas ce qu’Helena a envie de faire pour se sentir mieux. Elle se contente donc de discuter de choses et d’autres pour se changer les idées. Finalement, Helena décide de rester dormir chez Justine et ne rentre que dimanche après-midi à son domicile. Quand elle arrive, Marc est très occupé, il prépare son départ. En effet, il effectue un déplacement professionnel du lundi à venir, le 17 février, jusqu’au mercredi, le 19. En voyant Helena arriver, il s’interrompt, et même s’il lui reste encore des préparatifs, il décide de passer le temps qu’il lui reste avec elle pour se faire pardonner et parce qu’il a vraiment envie qu’ils se retrouvent. La soirée se déroule en douceur, sans que le couple reparle de l’incident. Helena s’endort adoucie mais pas vraiment apaisée.

    Le lundi 17 février, Marc part tôt en laissant une Helena nauséeuse et ensommeillée se réveiller. Helena a du mal à s’animer ce matin-là. Elle finit par se rendre au travail, encore chagrinée de son épisode avec Marc. Certes, ils ont passé une très bonne soirée la veille mais ils n’ont pas échangé à propos de la St-Valentin, et le ressenti qu’Helena renferme pèse encore sur elle. Elle continue de ruminer ses sentiments, si bien qu’elle n’entend pas les remarques de quelques-uns de ces collègues qui notent les rondeurs naissantes sur son corps. Sans doute a-t-elle fait des excès durant les fêtes ! Helena ne sort de sa torpeur que le lendemain midi quand elle reçoit un appel de son médecin lui annonçant que les résultats des tests lui sont parvenus. Il l’incite à passer le voir dès qu’elle le peut car les nouvelles ne sont pas très bonnes. Craignant pour la santé de son bébé, Helena décide de s’y rendre l’après-midi même. Une fois en sa présence, le médecin lui annonce que le bilan de ses examens le pousse à lui demander de réduire son nombre d’heures de travail. Si elle ne lève pas le pied, sa grossesse s’annonce difficile et elle et son bébé pourraient se retrouver dans une situation dangereuse. Helena est déconfite. Elle décide de rentrer chez elle pour le reste de la journée. Arrêter sa carrière, qui vient à peine de démarrer, n’était pas une option pour elle. D’un autre côté, elle sait que s’interrompre le temps d’une grossesse et d’un congé maternité n’est pas censé être un frein pour une carrière. Mais elle a encore tant à prouver… Et puis, elle n’est pas dans l’entreprise depuis très longtemps et sa place n’est pas assurée. Et puis elle sait toutes les difficultés que peut engendrer une grossesse : l’arrêt partiel ou total de son travail prématurément (ce qui lui arrive d’ailleurs en ce moment-même), un baby-blues, des infections… Et puis une remise en question sociale, et puis des jugements, et puis… Autant de complications qui pourraient l’empêcher de reprendre son travail au plus tôt ! Que vont en penser les autres ? Helena est bouleversée. Elle saisit son téléphone pour appeler Marc et l’informer de la situation, mais au dernier moment elle hésite. Il vaudra mieux lui en parler en personne. Et cela va lui laisser le temps de réfléchir à une solution qui lui conviendrait. Elle a toujours fait du bon travail… Du moins, du mieux qu’elle pouvait ! Elle a fait beaucoup d’heures supplémentaires, souvent non payées, pour faire avancer ses missions et les réussir dans le temps imparti. Elle est impliquée et volontaire… De plus, elle est dans l’entreprise depuis bientôt deux et demi, sans compter son stage. Elle est dans les bonnes grâces de Frédéric, qui connaît bien sa valeur, elle l’espère en tout cas. Elle ne devrait donc pas se faire évincer de l’entreprise pour ses futurs congés. Rassérénée sur ce point, Helena poursuit sa réflexion. Comment peut-elle concilier son envie de travailler et son besoin de lever le pied ? La solution apparaît d’elle-même : il faut qu’elle demande un temps partiel. Ainsi, elle sera toujours présente dans l’entreprise, elle pourra toujours conduire ses projets actuels, être au courant des nouveaux, participer à l’évolution de l’entreprise… Oui, elle veut rester investie. Et d’un autre côté, elle aura plus de temps pour se reposer, pour se détendre et pour préparer l’arrivée du bébé. Oui cela semble la meilleure solution à adopter. Plus sereine, Helena décide d’annoncer la nouvelle à Marc le lendemain, lorsqu’ils se verront en face à face. Entre temps, cela lui laisse la possibilité d’affiner son plan.

    Mercredi 19 février, Marc rentre de son déplacement en milieu d’après-midi. Il a fini ses heures de travail et il décide de rentrer chez lui préparer un repas pour Helena. Le soir venu, Helena est agréablement surprise de voir qu’il a organisé un temps spécial pour eux deux. Ils en profitent pour échanger à propos de la Saint Valentin ratée et Helena laisse sortir les sentiments qui l’envahissaient jusqu’alors. Suivant cette belle voie de réconciliation et d’entente, Helena parle des nouvelles du médecin et des conclusions auxquelles elle est arrivée la veille. Marc l’écoute attentivement. Il est d’abord soulagé d’apprendre qu’Helena va se décider à lever le pied, suites aux recommandations du médecin, mais ce sentiment est de courte durée puisque si un professionnel en arrive à ces conclusions, c’est que la situation d’Helena est plus grave que la normale. Marc est inquiet et il souhaiterait qu’Helena arrête totalement le travail. Cependant, il entend à quel point travailler est important pour elle ; il entend cette volonté presque désespérée de rester impliquée dans l’entreprise. Aussi, il se range son avis pour une demande de temps partiel. Il se met ensuite à penser aux conséquences budgétaires que ce changement va produire. Il est l’homme de la maison, c’est à lui d’assurer le confort financier et matériel de sa famille et de subvenir à ses besoins, surtout quand sa conjointe est en difficulté. Il sait qu’il va devoir travailler encore plus. Tout en continuant ses réflexions, Marc se met à penser à voix haute. Helena qui l’entend est soudain confuse. Marc lui expose alors une partie de ses pensées et une grande tristesse gagne Helena. C’est déjà suffisamment dur pour elle de devoir mettre un frein à sa carrière, mais si son partenaire n’est jamais là, ni pour elle, ni pour le bébé à venir, et que c’est une répétition de soirées ratées et de rendez-vous manqués, Helena ne se voit pas le supporter. S’ensuit une longue discussion. Finalement, le couple s’accorde sur les décisions finales : Helena va demander un temps partiel et Marc, lui, ne va pas demander un changement de ses heures de travail, en positif ou en négatif, mais moins de déplacements. Marc a cédé à Helena, tout en espérant qu’elle change d’avis. Sans parler du fait que cette demande pourrait ralentir sa carrière à lui et qu’avec le temps partiel d’Helena, leurs revenus vont diminués. Marc sait qu’il s’agit de son devoir de maintenir, si ce n’est d’améliorer, les conditions de vie de sa famille…

    Il n’est pas complètement d’accord avec ce compromis.

 

Auteure ou autrice (va falloir choisir un jour) : Lorysse Marchal

Le chapitre 5 la semaine prochaine !

La disparition de Helena – Chapitre 3

Chapitre 3 – Une nouvelle inattendue

 

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    Décembre, c’est l’hiver, le ciel gris, les fêtes, la fin de l’année… Alors que la vie continue, Helena est tellement stressée qu’elle n’a pas ses menstruations quand arrive le moment présumé, mi-décembre. Mais comme cela lui est déjà arrivé par le passé, elle ne s’inquiète pas outre mesure.

    L’année 2020 commence et avec elle débute une nouvelle décennie. Les choses au travail ne changent pas et lorsqu’Helena a du retard sur ses règles mi-janvier, elle se pose des questions. Les menstruations peuvent ne pas se présenter à cause du stress, une fois oui, mais deux fois… Troublée, Helena parle de ses doutes à son amie Justine et décide d’effectuer un test de grossesse. Le test se révèle positif ; Helena est enceinte depuis environ 9 semaines. C’est un choc pour elle. Marc et elle n’ont encore jamais parlé d’enfant, et si elle en voulait, ce n’était pas pour tout de suite. Cette annonce la laisse stupéfaite, surtout que le couple s’est toujours protégé.

    Le jour même, elle annonce la nouvelle à Marc. Ce dernier est abasourdi ; il ne réalise pas tout de suite l’ampleur des changements que cette nouvelle va engendrer. La surprise le laisse décontenancé et Marc passe par une phase de déni pendant quelques jours. Cette attitude distante blesse Héléna qui se sent très seule. Alors que Marc l’évite, elle se met à s’interroger : doit-elle ou non garder l’enfant ? Sa grossesse étant plutôt avancée pour envisager un avortement (en France, l’avortement peut être pratiqué jusqu’à la fin de la 12ème semaine), Helena sait que la décision doit se prendre rapidement. Finalement, Marc accepte la nouvelle et prend conscience à son tour qu’il leur faut vite se décider concernant la question de l’avortement. Marc souhaite garder l’enfant et il se soucie de pouvoir assurer le confort matériel et financier de sa petite famille en devenir. Il veut qu’Helena lève le pied sur le travail et prenne soin d’elle, quitte à ce que lui, fasse des heures supplémentaires. Pour lui, c’est ce qu’il y a de mieux à faire. En revenant vers elle, Marc expose son plan à Helena ; il s’attend à ce qu’elle l’approuve instantanément puisqu’il s’agit de la meilleure solution. Cependant, Helena, un peu vexée de l’éloignement de Marc, n’est pas tout à fait d’accord.

    Ce nouveau tournant est difficile à vivre pour Helena, qui pense à sa carrière. Elle souhaitait attendre un peu avant d’avoir des enfants. Après tout, elle a seulement 25 ans et cela va faire à peine 2 ans et demi qu’elle est sur le marché du travail. De la joie, de l’espoir, de la peur, de l’impatience, de l’angoisse, de l’appréhension… Helena nage dans un tourbillon d’émotions intenses qui la perturbent et l’obsèdent. Elle se tourne vers sa sœur et vers Justine. Cette-dernière est très positive et essaie de l’apaiser. Quelle que soit la décision finale, Justine soutiendra Helena et l’aidera de son mieux. D’un autre côté, Jeanne, sa sœur, lui rappelle les regrets de leur mère d’avoir mis sa carrière de côté : « Ne refait pas la même erreur que maman… ». Helena ne sait pas quoi penser et les jours défilent. Parallèlement, ses journées au travail sont toujours aussi dures. Helena s’y rend chaque matin avec une boule au ventre et en revient le soir alors que la nuit est tombée depuis longtemps.

    Quelques jours plus tard, Marc et Helena entament une longue discussion. Le couple finit par décider de garder cet enfant-surprise. Marc pense toujours que son plan de départ est la meilleure solution mais Helena refuse d’abandonner sa carrière. Marc lui conseille tout de même de rester discrète sur sa grossesse et Helena est d’accord car elle considère que cet événement est de l’ordre de sa vie privée, qu’elle ne tient pas à exhiber au travail. Marc lui, pense à sa carrière, il ne veut pas qu’on pense de lui qu’il est trop jeune, trop insouciant, voire irresponsable. Il se met à faire des heures supplémentaires, pour compenser cette idée qu’il se fait, de ce que l’on va penser de lui, et aussi pour ramener plus d’argent à son foyer. En tant qu’homme, il se doit de faire en sorte que sa famille ne manque de rien. Helena, elle, veut prouver qu’elle peut avoir un enfant et une carrière en même temps. Elle ne veut pas abandonner sa carrière comme sa mère, ou lever le pied, comme Marc le lui demande. Aussi, elle continue de faire ses heures supplémentaires et redouble de détermination pour travailler.

    Fin janvier, sa grossesse étant bien amorcée, Héléna commence à en ressentir les symptômes : elle est nauséeuse le matin et se sent plus fatiguée. Cela lui laisse forcément moins de temps pour se préparer avant de partir au travail. Elle prend moins soin d’elle, de sa peau et c’est sans compter cette méchante poussée d’acné due aux hormones qu’Helena subit en plus du reste. Son corps commence également à changer. Certes très légèrement mais suffisamment pour faire pencher à droite l’aiguille de la balance. Ses journées sont longues et épuisantes mais elle s’accroche. Par ailleurs, entre ses heures supplémentaires à elle et celles de Marc, les rendez-vous professionnels et les déplacements, les amoureux n’ont plus beaucoup de temps pour se retrouver. L’absence de Marc se fait sentir et Helena se sent un peu délaissée. Marc, lui, s’occupe son image au travail et reste fixé sur son idée qu’il se doit d’assurer le confort financier de sa famille.

    Le mois de février arrive et les difficultés d’Helena, dues à sa grossesse et à ses journées au travail continuent. Pascale Prot, Brian, Frédéric, Marc, le bébé, les missions de travail, les heures supplémentaires… sont autant de sources de stress qu’Helena endure chaque jour. Elle est très fatiguée, mais c’est excitée, et un peu anxieuse, qu’elle se rend à son premier rendez-vous gynécologique pour sa grossesse, le jeudi 6 février. Le professionnel est satisfait de l’examen. Il conseille néanmoins à Helena de consulter un médecin pour sa fatigue anormale. Elle prend donc rendez-vous et en obtient un rapidement pour le jeudi de la semaine suivante. Dans l’intervalle de temps, Helena se réjouit de cette première consultation qui s’est bien déroulée. Elle s’attriste cependant de ne pouvoir partager sa joie avec Marc. Ils sont si occupés tous les deux qu’ils ne se voient presque plus. Aussi, avec l’approche de la Saint-Valentin, ils prévoient de se rattraper autour d’une soirée romantique où il ne sera question que d’eux deux.

    Le jeudi 13 février, Helena se rend chez le médecin et celui-ci trouve aussi son niveau de fatigue anormal. Il décide de lui faire passer une batterie de tests afin d’en avoir le cœur net. Le jour même, Helena se rend dans différents établissements pour réaliser les tests prescrits. Elle n’en sort que plus harassée. Ce soir-là, Héléna se couche tôt, avec en tête la perspective de la soirée en amoureux du lendemain.

 

    Ce vendredi 14 février, Helena ne fait pas d’heure supplémentaire ; elle rentre directement après ses heures de bureau et se prépare pour la soirée à venir. À 19h elle s’aperçoit qu’elle a manqué un appel de Marc. Il lui a laissé un message : « Coucou ma puce ! Ça va ? J’espère que tu es bien rentrée. Moi je suis encore au travail… Un dossier urgent à finir. … Écoute… Pour ce soir… ça va pas être possible. Je suis vraiment désolé ma chérie, je sais que tu attendais cette soirée avec impatience… Et moi aussi d’ailleurs ! Je suis vraiment désolé, j’ai un repas imprévu de dernière minute avec un potentiel futur client. Frédéric m’a prévenu il y a à peine une demi-heure… Mais c’est pas grave ! On va se la faire demain notre soirée romantique d’accord ? Quoi que, attend, du coup faudra que j’étudie ce nouveau coup… Non mais on va trouver le temps ! Je t’aime, je suis désolé, j’espère que tu comprends. Je te fais un gros bisous mon cœur, rappelle-moi ! Bisou. » En écoutant le message, Helena tombe des nues… Elle s’attendait vraiment à une soirée en tête à tête. Elle est bouleversée et choisit de ne pas rappeler Marc. Au lieu de sa soirée en amoureux, elle passe la soirée seule… Tout le stress accumulé, ses attentes déçues, Héléna craque et s’effondre. Elle passe une grande partie de la soirée à pleurer et finit par s’endormir, le visage humide de larmes. Elle n’entend pas Marc rentrer mais elle est réveillée par l’odeur du vin que dégage son haleine quand il vient l’embrasser sur le front.

Auteure ou autrice (va falloir choisir un jour) : Lorysse Marchal

Le chapitre 4 la semaine prochaine !

La disparition de Helena – Chapitre 2

Chapitre 2 – Le début d’une carrière

 

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    Le jour où Helena retourne chez Automob’Act, le lundi 2 octobre 2017, elle retrouve ses repères. Elle intègre l’équipe dans laquelle elle a fait son stage : l’équipe du service Laboratoire Composite dans le département Recherches de la filiale Recherches et Développement. Frédéric, son ancien tuteur, est à présent son supérieur. Pour plaisanter et parce qu’il l’aime bien, il continue de l’appeler sa petite stagiaire. Helena sait bien que c’est une marque de sympathie de sa part. Par ailleurs, Frédéric prend toujours son rôle à cœur et continue d’encourager Helena à sa façon. Il lui fait des remarques et parfois même des remontrances, sans se soucier de la présence de collègues alentours. Pour cet homme direct, c’est sa manière de la pousser à donner le meilleur d’elle-même ! Après tout, ce n’est pas parce qu’elle est une femme qu’elle fait moins bien. Il veut l’amener à se surpasser pour que tout le monde voit sa valeur, comme lui la voit. Helena est un peu son poulain. Mais ces « encouragements », prodigués avec tant de bonne volonté, n’ont pas vraiment l’effet escompté sur Helena… Elle vit ces remarques publiques comme humiliantes et ce traitement spécial n’est pas vraiment ce qu’elle attendait pour son retour dans l’entreprise en tant qu’ingénieure diplômée. De plus, Frédéric, un peu maladroit mais toujours aussi bon vivant, a pour habitude de faire des blagues parfois à la limite du sexisme. Il se croit drôle et ne pense vraiment pas à mal.

    D’autre part, Helena découvre une drôle d’habitude de l’une de ses collègues, madame Pascale Prot. Très expérimentée, cette femme d’âge mûr travaille dans l’entreprise depuis plus de 20 ans. Elle a commencé dans le service Recrutement du département Ressources Humaines et est aujourd’hui dans l’équipe Evolution des Compétences du même département. Rigoureuse et assez stricte, elle a des idées bien arrêtées sur ce que doit être l’entreprise et le comportement des personnes au sein de cette institution. Aussi, elle utilise une méthode assez originale pour faire savoir aux gens ce qu’elle pense : elle passe par le biais de Post-its. Pascale Prot a des Post-its roses et des Post-its bleus ; les premiers pour les femmes et les seconds pour les hommes. Elle adhère totalement aux valeurs prônées par le directeur : « disponibilité, efficacité et dévotion ». Elle juge les autres selon leur performance et laisse ses remarques sur des Post-its. Cependant, Pascale estime que les femmes ont plus à prouver que les hommes et que les deux sexes ont chacun leurs domaines de compétences. Par exemple, les femmes se doivent d’écrire sans fautes d’orthographe et d’être irréprochables sur leur apparence au travail, elles doivent également être organisées et méticuleuses. Pascale à toute une série d’idées suivant ce modèle. Globalement, elle est plus laxiste avec les hommes qu’avec les femmes, même si eux aussi ont leurs critères à respecter. Pascale n’écrit que rarement des compliments sur ses Post-its, qu’elle dépose un peu partout (sur les ordinateurs, bureaux, tiroirs, gobelets de cafés, etc.) ; et les seuls qui aient reçus ces compliments ont toujours été des hommes. Helena, elle, retrouve régulièrement des Post-its sur son bureau, mais jamais pour témoigner de son approbation. « J’ai retrouvé une faute dans ton rapport », « écriture peu soignée », « ordinateur allumé avant de partir » sont plutôt les messages qu’elle reçoit. Parallèlement à ses notes, il est déjà arrivé à la responsable un peu froide de faire des remarques orales à Helena, notamment sur ses tenues vestimentaires.

 

    Durant ses premiers mois d’embauche, Helena essaie de composer avec tous ces éléments et de s’améliorer pour être à la hauteur des expectatives qu’elle pense qu’on attend d’elle. Elle saisit toutes les pistes d’amélioration qu’on lui soumet, même si elles sont parfois exposées de façon blessante ou grossière. Elle se voile un peu la face sur la nature de ces « pistes d’améliorations ». Elle est très volontaire et pleine d’entrain dans son travail. D’un autre côté, Helena encaisse les remarques publiques de Frédéric, les post-its et les critiques acides de Pascale, en plus de ses missions de projet, pour lesquelles elle travaille d’arrache-pied. Elle essaie de rire avec son manager, de ne pas renouveler les erreurs signalées par Pascale…

    Helena s’habitue doucement à sa nouvelle vie. Sa relation avec Marc s’épanouit et le couple décide de s’installer ensemble dès janvier 2018. Ils filent leur amour et après tout, c’est bien pratique pour faire du covoiturage !

 

    Mais plus les mois passent et plus les comportements de ses collègues la révolte. Viennent s’ajouter les publicités ciblées plus ou moins sexistes qu’elle reçoit régulièrement par courriel. Au début, elle n’y a pas prêté beaucoup d’attention mais avec le recul de ses mois de travail, elle se rend compte que ces publicités sont assez fréquentes et de plus en plus régulières. Si ces courriels l’ont fait rire au début, ils l’agacent pleinement à présent et viennent se cumuler aux difficultés qu’elle rencontre déjà.

    Les agissements de ses collègues et les désagréments qu’elle traverse continuent. Malgré tout, Helena fait de son mieux et son travail est exemplaire. Finalement, elle fait la connaissance, en août 2018, de Brian, un collègue rattaché au service Projets Transversaux du département Innovation de la même filiale qu’elle : la filiale Recherches et Développement. Les deux équipes sont amenées à effectuer une mission commune pour l’entreprise. Très vite, Helena se rend compte du caractère macho et vulgaire de Brian. Il rigole fort, regarde les femmes du coin de l’œil en souriant et fait des blagues sexistes.

    Un jour, alors qu’Helena se sert un café dans le petit salon du département, elle entend la voix fière et grave de Brian, se rapprochant : « Et là, elle me sort : ‘’Brian ? Tu t’appelles Brian, comme dans ‘Where is Brian?’ ?’’. Eh ! Et tu sais pas c’que j’lui réponds ?! ». Et dans un rire tonitruant, il finit : « Ouais bah j’lui répond que si ‘Brian is in the kitchen’, c’est parce que c’est l’endroit où il sait qu’il peut trouver des femmes et de la bière ! ». Helena en reste bouche bée. Cette blague aurait pu être amusante si elle était prononcée au second degré mais ayant appris à connaitre le personnage, elle sait que Brian pense ce qu’il a dit. D’ailleurs, avec son excès de confiance en lui, cet homme se permet de draguer non seulement elle, mais aussi presque toutes les femmes de l’entreprise. Combien de fois est-il passé par l’accueil en proposant à Justine de « faire un tour dans sa voiture puis de passer la nuit chez lui » ? Les remarques dragueuses et condescendantes sont une habitude pour lui lorsqu’il s’adresse à une femme. Ce jour-là donc, alors que Brian apparaît dans le petit salon, accompagné d’un collègue, il passe à côté d’Helena et lui lance : « Hello beauté » avec un clin d’œil, puis il enchaine d’un air présomptueux : « Quand tu m’amèneras le dossier, tu me prendras aussi un café, hein ? Tu es mignonne. ». En partant, il donne un coup dans l’épaule de son collègue en pouffant.

    Au fil du projet, Helena apprend à s’accommoder au caractère de Brian. Elle s’habitue à ses mails qui commencent trop souvent par des « Salut ma belle » et se terminent par des « Je t’embrasse ». C’est le comportement que Brian a avec la gente féminine en général, elle sait qu’elle ne doit pas le prendre personnellement et s’en insurger. Surtout que parallèlement, il est moteur dans le projet et très efficace au travail.

    Heureusement, elle peut compter sur le soutien de sa sœur et sur leur relation. Même si elles ne se parlent pas régulièrement, elles restent proches. Elle est aussi très amie avec Justine, l’hôtesse d’accueil qui a toujours la tchatche, si bien qu’elles sont devenues confidentes. Elles se voient à l’entreprise mais aussi en dehors : à l’occasion d’afterwork ou même de sorties entre elles, qu’elles organisent en soirée ou les week-ends. Cette amitié est très chère aux yeux d’Helena. Et puis il y a Marc Tomphy, son amoureux… Si au travail ils entretiennent une relation strictement professionnelle, décision prise d’un commun accord, le jeune couple a, dans l’intimité, une relation simple et complice. Marc est une personne rationnelle et sérieuse, au travail comme en amour ; il prend très à cœur leur relation. Helena sait qu’elle peut compter sur son soutien et le savoir suffit à la rassurer. Elle ne lui raconte pas tout ce qu’elle traverse durant ses journées à l’entreprise. En effet, sans compter les nombreux déplacements professionnels que Marc est amené à faire, quand ils rentrent chez eux, Helena et Marc préfèrent ne plus penser au travail ; ils distinguent bien la sphère privée de la sphère professionnelle. De plus, Helena souhaite gérer elle-même la situation qu’elle vit ; elle veut être forte.

    Cependant, Helena s’exaspère devant le comportement de Brian et n’accepte pas d’être traitée pour moins que ce qu’elle n’est. Son humeur froide alerte Marc qui essaie de comprendre afin de soulager et d’aider au mieux celle qu’il aime. Alors qu’Helena préfère garder pour elle ses problèmes au travail, elle décide de s’ouvrir et lui explique son quotidien aux côtés de Brian. Marc n’a rien vu ; il est tellement absorbé par ses missions et ses déplacements. De retour dans l’entreprise en ayant connaissance de ce que lui a dit Helena, Marc se rend compte du comportement de Brian avec les femmes. Il décide, sans en parler à Helena, d’avoir une discussion détendue avec lui, dans le but que Brain se tempère un peu. Marc veut sincèrement aider Helena, mais d’un autre côté, il veut éviter de faire trop de bruit, pour ne pas entacher sa propre image. Il se dit aussi, à raison, qu’Helena ne souhaite pas être perçue comme une femme qui se cache derrière son homme pour se défendre. Suite à cette discussion, Brian se calme un peu vis-à-vis d’elle. Toujours dragueur avec les autres femmes, il remplace néanmoins ses « Je t’embrasse » par des « La bise » dans les signatures de ses mails à Helena. Il évite aussi les remarques et les blagues s’adressant directement à elle mais choisit plutôt de les faire à ses collègues (et amis) d’une voix forte lorsqu’Helena passe près de lui. Helena ne reparle plus de Brian à Marc. Très attentionné, mais un peu égocentrique et solitaire, il estime que l’affaire est réglée. Les mois continuent et avec eux, le projet en collaboration et les dures conditions de travail d’Helena.

 

    Mais alors que le temps passe, Helena comprend que les agissements de ses collègues (Frédéric Louchalle, Pascale Prot, Brian…) ne vont probablement pas cesser. Aussi, d’agacée, elle devient progressivement passive à ces comportements. Ils se banalisent à ses yeux. Mais sans prendre autant de place dans son esprit par leur injustice, ces agissements continuent de peser sur elle. Elle ne s’exprime plus sur sa situation. Ni à Marc, ni à sa sœur, ni même à Justine. Pour Helena, cette vie est devenue son quotidien et parler ne sert plus. Elle est triste, de plus en plus lasse et fatiguée. Elle perd progressivement confiance en elle et commence à s’assombrir.

    Pendant ce temps-là, Frédéric, qui ne voit plus Helena se raidir à ses blagues, pense qu’elle les accepte et lui en fait plus encore. Il ne se rend pas compte des troubles d’Helena, d’autant qu’elle continue à rendre du bon travail. Si des fois il remarque une baisse d’entrain, Frédéric tente de stimuler Helena, à sa manière un peu lourde et maladroite ; ce qui a souvent pour effet de faire sourire Helena tout en lui rajoutant un poids sur les épaules. Pour maintenir la bonne qualité de son travail, et parce qu’elle cède au sentiment qu’elle doit constamment prouver qu’elle n’est pas plus nulle qu’une autre et qu’elle mérite sa place, Helena travaille toujours plus. Elle fait des heures supplémentaires et s’attarde presque tous les soirs pour avancer ses missions. Certaines soirées, elle croise Henry Commure, le vigile de son secteur de l’entreprise. C’est l’occasion pour eux de discuter un peu et le cinquantenaire se rend rapidement compte de la fatigue d’Helena. Henry Commure est un homme gentil et doux ; il est volontaire et un peu maladroit. Il est témoin des violences passives que subit Héléna et le soir, quand elle se pense seule à travailler dans son bureau, Henry voit son visage accablé et las. Il trouve oppressante l’attitude de Frédéric et il essaie tant bien que mal, quand il la croise, de remonter un peu le moral d’Helena. Elle, apprécie sa présence : même s’il est parfois un peu envahissant, la compagnie et la conversation d’Henry (qui en dit souvent plus ce que ce qu’il ne devrait) lui mettent du baume au cœur.

 

    Quand arrive décembre 2019, accompagné de son ciel bas et gris, Helena est devenue toute renfermée, presque éteinte. Elle ne parle plus de ce qu’il se passe au travail mais sa situation l’affecte beaucoup. Elle traverse ses journées de façon confuse et atone.

 

Auteure ou autrice (va falloir choisir un jour) : Lorysse Marchal

Le chapitre 3 arrive la semaine prochaine !